Voilà, il fallait que je le dise car c’est une réalité. Difficile à entendre, certes, mais bien réelle à mon grand désespoir.
L’éducation bienveillante ne peut pas fonctionner.
Ça va faire sourire certains, grincer des dents d’autres. Mais à un moment donné, il faut arrêté de se la raconter. Il faut garder espoir, il ne faut pas baisser les bras, l’espoir fait vivre… Je sais je sais.
Mais quand on part sur des mauvaises bases, il ne faut pas s’étonner du résultat.
Il y a une pointe d’agacement dans ce que j’écris, je reconnais. Oui, c’est vrai. C’est parce que je suis déçue. Je suis déçue que nous, les personnes qui nous battons pour le respect de nos enfants, n’ayons pas réussi à atteindre nos objectifs.
Pourquoi l’éducation bienveillante est vouée à l’échec?
L’étiquette
Et bien la principale raison est que l’éducation bienveillante, la parentalité positive s’est collée une « étiquette ».
Pourtant, justement, elle sait à quel point les étiquettes sont néfastes au bon développement.
Elle qui prêche de ne pas mettre dans des « cases » toutes faites les enfants. Elle qui nous explique comment dire à un enfant qu’il est méchant, idiot, capricieux, ou sage et gentil a une influence sur la personne qu’il va devenir. Elle qui nous démontre que répéter à un enfant qu’il est comme ci ou comme va faire qu’il va devenir comme ci ou comme ça.
Alors pourquoi s’est-elle mise dans une case? Pourquoi se limiter à une étiquette?
En tant que « maman bienveillante », je peux vous dire que cette étiquette est vraiment lourde à porter. Violaine du blog 365 jeux en famille en témoigne parfaitement (voir son article ici).
Moi aussi, au quotidien, je vous assure que c’est dur à vivre. Comme si on n’avait plus le droit à l’erreur. Comme si, du fait de bloguer sur l’éducation bienveillante (mais j’imagine que ce doit être un peu pareil pour celles qui ne bloguent pas), nous obligeait à devenir une maman parfaite. Et que si apparait un petit « défaut », c’est l’occasion de se faire tomber dessus: « tu crois que c’est bienveillant ça? », « tu donnes des leçons aux autres et toi tu fais ça » (sérieux, comme si je donnais des leçons en plus. Non non, je partage mon expérience, mes connaissances, c’est tout!). Bref, c’est pesant.
Alors oui, je confirme, les étiquettes c’est naze. Ça fait plus de mal que de bien.
Il n’y a qu’à voir combien de personnes disent ne pas aimer le terme « éducation bienveillante », comme si cela sous-entendait que les autres étaient malveillants.
Pareil pour la « parentalité positive ». Les autres seraient-ils négatifs?
Du coup, en ce moment, j’entends beaucoup de monde me dire « je préfère parentalité consciente ». Oui, mais alors les autres sont inconscients?
Bref, tout ça pour dire qu’en réalité, chacun essaie de se dépatouiller de cette étiquette qui visiblement, pose problème.
Comment se sortir de cette incohérence? Je n’ai pas trouvé pour le moment.
En attendant, beaucoup s’en servent pour prouver que cette méthode éducative a ses limites.
La définition
Vous avez dû vous en rendre compte, l’éducation bienveillante, la parentalité positive sont des « concepts » extrêmement difficile à définir.
C’est bien le problème.
Nous sommes nombreux à tenter de le faire.
J’ai même réalisé un carnaval d’articles pour ça, que vous pouvez trouver ici. J’ai aussi écrit un article pour expliquer ce que n’est pas l’éducation bienveillante par ici.
Mais concrètement, le message a du mal à passer et la polémique continue.
Il faut dire aussi que depuis quelque temps, on voit et on entend de tout et son contraire au sujet de l’éducation.
Alors c’est normal que dans ce floue artistique, on soit un peu perdu.
Trop d’information tue l’information.
En même temps, comment définir un concept, une chose si subjective?
Du fait d’une définition peu claire, certains pensent par exemple que c’est être trop laxiste, que cela créer des enfants rois ou encore que les parents n’ont plus de vie.
Bon, c’est vrai qu’il n’y a pas que la définition qui entre en jeu là dedans. Voyons ça tout de suite.
Un changement trop radical
Ce type d’éducation bouleverse tellement de croyances que beaucoup le rejette.
Tout le monde le sait, le changement fait peur.
Ok mais ai-ce une raison pour le rejeter? Quand même la science prouve que tel ou tel comportement est nocif ou au contraire aide au développement du cerveau?
Mais soit, je comprends qu’il soit difficile de se lancer dans un si grand changement surtout quand ce n’est pas très clair.
Je comprends qu’il est difficile d’admettre que tout ce que nous avons appris ne soit pas approprié. De prendre conscience que ce que nos parents nous ont enseigné et transmis a peut-être créé des blessures, des traumatismes, des névroses alors qu’ils ont fait de leur mieux.
C’est vrai que ce n’est pas plaisant. Mais que ça fait du bien ensuite de savoir qu’on peut aller de l’avant.
Grâce à nos parents et aux générations avant, nous avons la chance de constater ce qui est bon pour nous ou pas. Alors apprenons de nos erreurs tout simplement.
Alors quoi faire?
Il me semble que lorsque l’on regarde les grands référents de la parentalité positive (Isabelle Filliozat, Andre Stern par exemple), jamais ils ne parlent de méthode « machin » ou de technique « bidule ». Ils ne se collent pas d’étiquette. Ils ne se mettent pas dans une case bien définie.
Non, ils informent, ils transmettent, ils partagent leurs découvertes. Ils parlent de bienveillance, d’empathie comme des attitudes face à des situations.
En ce moment, je croise pas mal de parents qui, sous prétexte d’avoir choisi de se lancer dans l’éducation bienveillante, se mettent la pression.
Eux-mêmes essaient de coller au plus près de cette étiquette ne se laissant plus le droit à l’erreur. Comme on le sait tous, à un moment, la pression doit sortir d’une façon ou d’une autre. Ce n’est pas bon.
Sans parler des parents qui n’arrivent pas à définir et à comprendre correctement en quoi consiste l’éducation bienveillante. Évidement puisque c’est mal défini.
Donc chacun interprète à sa façon. C’est pourquoi on en arrive à de grosses incompréhensions, à des épuisements, à des rejets, etc.
La preuve, combien de blogueuses, par exemple, disent être « contre » la bienveillance et la pratiquent? Combien de parents ne savent même pas qu’ils sont totalement dans la parentalité positive? Et combien de parents se disent bienveillants et finalement ne le sont pas (je ne dis pas qu’ils sont malveillants, hein).
Alors oui, la parentalité positive, l’éducation bienveillante, la parentalité consciente ou je sais pas quoi, a permis et permet à de nombreux parents de prendre conscience que l’éducation que l’on a connu jusque là n’est pas la plus appropriée au bon développement du cerveau (j’en suis la preuve). Mais pas suffisamment. C’est un début, certes.
Oui, grâce à la science, à la compréhension du fonctionnement du cerveau, nous pouvons adapter nos façons de faire avec nos enfants pour leur bien.
De là à dire que c’est la réponse ou la solution à tout, que c’est un mode d’emploi, pas vraiment.
Donc, l’éducation bienveillante ne peut pas toucher tout le monde. En tous cas, pas présentée de la sorte.
Il faudrait plutôt que cela devienne une suite logique de l’évolution, juste du bon sens, sans que ce soit une « méthode », une « technique ».
Aujourd’hui, si on vient me voir avec une « technique » qui va changer ma vie mais qui bouleverse tout et qui en plus n’est pas très claire, je vais dire: « oh lala, attends, c’est quoi ton truc là? » Je risque de ne pas être très ouverte.
C’est pour cette raison que je pense que dire « l’éducation bienveillante, c’est la solution » n’est pas constructif.
Comme j’ai dis plus haut, juste partager, démontrer sans parler d’une quelconque référence éducative fonctionne déjà mieux pour une prise de conscience.
Sortir de l’étiquette est salutaire pour nos enfants.
Alors que l’éducation bienveillante, la parentalité positive, la parentalité consciente ou active soit la meilleure chose pour nos enfants, j’en suis certaine. Mais que l’on arrive à sensibiliser un maximum de parents et de pros de l’enfance par ce biais là, j’en doute de plus en plus.
8 commentaires sur “Pourquoi l’éducation bienveillante ne peut pas fonctionner”
Tu pointes exactement le doigt sur ce que j’en pense! Je ne suis pas « pro » éducation bienveillante, alors même qu’au fond je pense la pratiquer.
En réalité, c’est ce terme flou, et comme tu dis cette étiquette, culpabilisante, qui me gêne. Je ne crois pas que ce soit à vrai dire une méthode – pour moi c’est du bon sens, une inclinaison générale pour élever son enfant. Je ne l’envisage pas comme une « solution » mais comme des idées, et ça me gêne quand certains y voient une théorie à appliquer stricto sensu, et qui ouvrirait les portes du bonheur de son enfant.
Et très honnêtement, ça fait plaisir de lire ce type de prise de recul, de la part d’une auteur qui visiblement est une adepte (je découvre tout juste ton blog, attirée par le titre de cet article!).
C’est tout à fait ça, du bon sens et des pistes de réflexion. Merci et je vais aller découvrir ton blog aussi
Merci Jennifer pour cet article qui complète bien mes dernières « confessions de mère imparfaite » ;-). Je te sens un peu découragée et je te comprends. Cependant, je reste positive 🙂 et comme toi je pense qu’il » faudrait plutôt que cela devienne une suite logique de l’évolution ». Et justement ce que tu fais, ce que nous faisons, va dans ce sens et j’ai foi ! Bien entendu il faudra beaucoup temps, mais on sème la graine et comme beaucoup d’autres jardiniers… un jour on verra la récolte (ou pas). L’important est de continuer avec nos valeurs et continuer à se former et informer ! Et tu le fais très bien. Alors go go go. Rome ne s’est fait fait en un jour ! ;-). Bon courage 🙂
Merci Violaine pour ce soutien. C’est vrai, tu as raison, chacun apporte sa pierre à l’édifice. Même si parfois je décourage un peu, je garde le cap. On va y arriver !
Bonjour Jennifer
Je remarque de plus en plus ce retour en arrière sur la prise de parole des bloggers autour de la parentalité positive.
Tout changement fait peur et il est difficile de s’y retrouver quand on est seul-e face à ce changement.
En entreprise, on nous parle tout le temps de comment accompagner les salariés pour les aider face à des changements, parfois violents.
La parentalité positive, quand on n’a pas eu l’éducation positive, est un changement violent.
Et on peut soit l’accompagner doucement, soit se faire violence d’un seul coup.
Le problème est que le changement déclenche des réactions réflexes qu’on a acquises, selon moi, dès l’enfance.
Ainsi, nous voilà à dire que c’est un échec et que c’est pas possible : c’est possible, mais pas en ce mettant la pression, ou en essayant une semaine ou un mois et en disant à la fin, ça fonctionne pas.
Nous devons croire et avoir foi en ce changement
L’imposer aux autres par contre est dangereux et contre-productif 🙂
Au plaisir
Evan
Bonjour Evan,
Merci pour ces remarques très pertinentes. En effet, ce qui est violent entraine des réflexes de défenses et donc de rejet. Tout en douceur…
Et non, surtout ne rien imposer! Ce serait à l’opposé de ce que prône la bienveillance 🙂
Belle journée et à bientôt 🙂
Bonjour Jennifer,
« Incarne le changement que tu veux voir dans le monde. » disait Gandhi
Gardes patience et courage, tous les messages que tu fais si bien passer porteront leur fruits un jour.
Nous sommes arrivés effectivement à un tournant dans le domaine de la parentalité : on sait que les « méthodes » anciennes ne sont pas les meilleures alors on attend une nouvelle méthode !!! on veut, là tout de suite maintenant, un truc efficace à 100% et qui marche dans toutes les situations, sous peine de quoi on rejette en mettant la motion « ne fonctionne pas ». Peut être une dérive de notre société de consommation et de l’obsolescence programmée, de notre impatience chronique et notre quête perpétuelle de résultat …
Pourtant, toutes ces découvertes, tous les témoignanges nous indiquent que nous sommes sur la bonne route !!!
Une route… la prentalité est à envisager comme le bonheur : comme une aventure, une route à parcourir et non une destination à atteindre.
Alors continuons de faire de notre mieux, élevons nos enfants de manière imparfaite avec Amour et bienveillance en étant conscients de nos forces et de nos faiblesses… et nos enfants feront le reste…
Je te rejoins entièrement sur l’étiquette du terme « parentalité bienveillante/positive »… personnellement elle me met cette pression que je déteste, m’obligeant à être au top H24, à n’avoir aucun droit à l’erreur, quand en plus j’exerce la profession de Sophrologue, on s’attend à ce que je sois zen en permanence… pourtant je ne suis pas un vieux sage tibétain, ni un ange, encore moins une mère parfaite ; je suis juste MOI, avec mes hauts et mes bas…
Bien à toi
caroline
Bonjour Caroline,
C’est vrai, on veut tout tout de suite, quelle impatience finalement 🙂 C’est un pas après l’autre que nous arrivons à destination. Merci de le rappeler.
Tu as raison, continuons de faire de notre mieux avec nos imperfections.
Merci 🙂